Vincent Ruffin, peintre fort de trente années d’expérience, a ouvert le 30 septembre 2025 les portes de son atelier à la classe prépa arts du lycée Valin. Cette visite nous a permis non seulement d’entrer dans l’intimité du processus créatif de l’artiste au travail, mais également de découvrir son univers, ainsi que l’évolution continuelle de ses méthodes de travail et de son œuvre.
Plus qu’une simple visite, cette expérience a permis de comprendre comment un peintre s’empare, transforme et invente sa pratique au fil des ans, tout en intégrant son vécu, ses souvenirs et sa relation au monde.
Vincent Ruffin travaille essentiellement à la peinture à l’huile, médium qui lui permet de travailler la profondeur des matières mais aussi la subtilité des nuances.
Ses premières toiles se caractérisaient par des sujets plutôt engagés politiquement et socialement. Plus sombres, avec des couleurs profondes voire parfois absentes, produisant une atmosphère pesante, introspective, traduction des tensions et des préoccupations de l’époque qu’elles représentaient, ces toiles poussaient à l’interpellation, à soulever la question de la société, de ses inégalités, en rendant la peinture aussi bien moyen d’expression que de critique.
Aujourd’hui, sa démarche a évolué vers un travail plus intime et plus personnel. Ses toiles récentes s’inspirent de son enfance, des lieux de ses souvenirs, et des paysages qui ont marqué sa mémoire. Les couleurs sont désormais plus claires, souvent fluo et lumineuses, conférant aux œuvres une dimension plutôt nostalgique. Cette évolution montre le passage d’une peinture engagée vers une peinture introspective, où l’artiste explore les émotions, le temps et la mémoire, tout en continuant à expérimenter avec les formes et les textures. Cette transformation illustre la capacité de Rufin à se renouveler, à s’adapter et à faire évoluer son langage plastique selon ses préoccupations personnelles et artistiques.
Avant de se lancer dans une toile, Vincent réalise de petits croquis rapides, des ébauches qui servent à poser l’ambiance de sa toile . Ces croquis permettent à l’artiste de visualiser l’espace, la composition et la dynamique de ses œuvres. D’ailleurs, Il puise autant dans son imagination que dans le réel : il observe attentivement le monde qui l’entoure , capture des détails par le simple geste de la photo – paysages, objets, instants de vie – et les utilise comme matériau visuel dans ses compositions. Cette pratique lui permet de créer des œuvres à la fois inventives (par l’imagination de paysages ou de personnages ) et ancrées dans le réel, où mémoire, imagination et observation se combinent pour donner naissance à un univers singulier et cohérent. Pour Vincent Ruffin, être artiste signifie rester constamment en recherche, toujours chercher à se perfectionner et à évoluer. Trouver son style personnel n’est jamais une fin, mais un point de départ de nouvelles explorations, qu’elles concernent la technique, le sujet ou la relation à d’autres créateurs.
La carrière de Vincent Ruffin s’est construite également grâce à de nombreuses expériences à l’international. Il a participé à plusieurs résidences artistiques de grande envergure : à Cuba en 2018-2019, aux Philippines en 2016, à New York en 2012, et à la Villa Médicis à Rome en 2011, où il a collaboré avec le compositeur Juan Pablo Carreño. Ces séjours lui ont permis d’explorer différents contextes culturels, de confronter son travail à de nouvelles influences et de créer un dialogue entre son univers personnel et les réalités artistiques locales. Ses œuvres ont été exposées en France, mais également à Hong Kong, Tokyo, au Portugal, en Belgique, en Turquie et en Allemagne, confirmant ainsi la reconnaissance internationale de son travail et la force universelle de son langage pictural.
Vincent Ruffin est aussi à l’origine d’un collectif, Essence Carbone, qu’il a dirigé pendant six ans. Ce collectif lui a offert un espace de collaboration et de partage avec d’autres artistes, ce qui lui a permis de stimuler sa créativité et ses expérimentations.
Après cette période, il a quitté le collectif pour s’installer dans un atelier plus grand depuis deux ans, qu’il partage avec Rita, une artiste plasticienne florale. Cette collaboration se traduit par de grandes installations florales qui interagissent avec le travail de Vincent, créant un dialogue entre peinture et installation organique. Ce duo original ouvre de nouvelles perspectives plastiques et met en avant des formes d’interaction inhabituelles entre deux pratiques artistiques distinctes, dynamique qui met en avant les défis liés à la co-création et à la nécessité de trouver un équilibre où chaque artiste pourrait pleinement s’exprimer sans être subordonné à l’autre.
Compte-rendu réalisé par Lucile Grange–Matard et Mariem Yahia